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vendredi 10 mars 2017

Terracotta Warrior - Qin yong, Ching Siu-tung (1989)


La Chine, il y a 3000 ans, sous la dynastie des Qin. L'Empereur demande à un bataillon de chimistes de lui trouver la formule de l'immortalité. Parallèlement, deux amants sont condamnés à mort. En 1930, leur histoire va ressurgir à nouveau...

Terracota Warrior marque une étape de plus dans la grande entreprise de refonte de la mythologie et culture chinoise par Tsui Hark ici producteur. Avec son acolyte du fameux Histoire de fantômes chinois (1989), Ching Siu-Tung, il s’attaque ici à un vestige du patrimoine artistique chinois avec les guerriers de terre cuite.  Ensevelis avec le tombeau de l'empereur Qin Shi Huangdi et redécouverts en 1974, les guerriers de terre cuite sont baignés d’une aura légendaire sur laquelle surfe Tsui Hark par un récit romanesque jouant sur le temps. Si le film est cependant passé à la postérité, c’est par son casting qui officialise le couple emblématique du cinéma chinois, Gong Li et Zhang Yimou dans une de ses rares prestations d’acteur (du moins en premier rôle puisqu’il a pu avoir des interprétations plus furtives dans ses propres films). Tous deux avait déjà tournés ensemble le multi récompensé Le Sorgho rouge (1987), première réalisation de Zhang Yimou et premier rôle cinéma de Gong Li. Les deux formeraient bientôt un couple à la ville qui les emmènerait vers  d’autres grands succès publics et critiques comme Épouses et Concubines (1990), Qiu Ju, une femme chinoise (1992) ou encore Vivre ! (1994).

 Il y a deux films assez schizophrènes contenus dans Terracota Warrior. Le premier est le plus réussi avec dans un premier temps une magnifique romance en costume. Fong Tian (Zhang Yimou) est un officier dévoué à l’Empereur Qin (Luk Suk-bung) pour lequel il supervise la construction du fastueux tombeau et dont il assure la protection. La quête d’immortalité de l’Empereur l’amène à une folie où il convoque magie et alchimiste pour se maintenir au pouvoir, et la soumission de Fong Tian est mise à mal par la tyrannie de son souverain bien qu’il ne dévie jamais de ses ordres discutables. La remise en question viendra  par l’amour lorsqu’il rencontrera Tong Yi (Gong Li) jeune femme destinée à être sacrifiée à cette quête d’immortalité. Cette première partie est une merveille poétique et romanesque où l’on ressent formellement la maîtrise et les moyens que peut désormais déployer le cinéma de Hong Kong à cet âge d’or de la fin des 80’s. 

Décors impressionnants, costume fastueux et le tout dans un écrin façonné par la crème des techniciens de Hong Kong notamment la superbe photo de Peter Pau. Les idées formelles romantiques sont légions, que ce soit cette ritournelle musicale sur des rebords de bol accompagnant l’entraînement de Fong Tian, une étreinte dont le plaisir se confond en fondu enchaîné avec le bouillonnement d’un chaudron d’alchimiste et la magnifique séparation du couple sur fond de flammes. La musique de James Wong (auteur de tant de merveilles pour Tsui Hark) élève l’ensemble tandis que sobriété intense de Zhang Yimou et la beauté immaculée de Gong Li (elle a rarement été plus belle que dans ce film) apporte la force émotionnelle attendue au mélodrame. 

Une cruelle malédiction condamne ainsi Fong Tian à n’être qu’un guerrier de terre cuite figé jusqu’à son réveil inattendu 3000 ans plus tard durant les années 30. Il y fait la rencontre de Lili Chu, sosie et réincarnation de son aimée mais dont la mentalité en est bien éloignée. Lili Chu est une actrice de second plan ambitieuse et superficielle qui n’aspire qu’à être star. En mettant à jour le complot du séduisant Fei Bai-yun (Yu Rongguang), Lili Chu va s’exposer à un danger dont seul son amant du fond des siècles pourra la sortir. Le second film contenu dans Terracota Warrior est donc une comédie jouant sur le décalage temporel d’une rare lourdeur dans les gags et le jeu outrancier de Gong Li (plus convaincante dans la présence éthérée que le jeu outrancier, contrairement à une Maggie Cheung parfaite dans les deux registres) mais sauvé par des séquences très spectaculaires tel ce crash d’avion dans le tombeau de l’Empereur. 

Heureusement l’émotion peut refaire surface dès que l’hystérie s’atténue, notamment lorsque le décalage temporel ne repose plus que sur la solitude et le dépit de Fong Tian face à cette inconnue qui a les traits de la femme qu’il aima jadis. Le parallèle entre la quête le pouvoir impérial brutal passé et celui capitaliste et tout aussi violent du présent représenté par Fei Bai-yun est bien vu malgré l’interprétation sans finesse de Yu Rongguang. Les situations forment également une vraie ligne temporelle pour faire renaître les sentiments. Lili Chu confrontée au monde impitoyable du cinéma voit finalement Fong Tian comme son seul vrai et désintéressé protecteur et va enfin pouvoir l’aimer. 

De même 3000 ans plus tôt ce dernier avait défié l’Empereur par amour pour sa précédente incarnation et tout ce rejoue, la passion inconditionnelle comme sa suspension à travers le temps. Le final décline une autre grande influence de Tsui Hark à savoir Steven Spielberg et on pense fortement aux Indiana Jones avec l’éblouissant climax dans un tombeau truffé de pièges. L’éveil des guerriers de terre cuite face aux mercenaires est un grand moment épique où Ching Siu-Tung déploie toute l’efficacité qu’on lui connaît. La belle fin ouverte achève le voyage en beauté, bien aidé par l’alchimie naturelle entre Yimou et sa muse. 

Sorti en dvd zone 2 français chez HK Vidéo

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