Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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mercredi 24 octobre 2012

Brick - Rian Johnson (2005)


Brendan Frye (Joseph Gordon-Levitt) est un élève du lycée de San Clemente, une ville du sud de la Californie. Il reçoit un coup de fil de son ex-petite amie, Emily (Emilie de Ravin), terrifiée et en larmes, le suppliant de l'aider. Elle disparaît peu après. Avec l'aide d'un autre lycéen solitaire, et le soutien prudent du surveillant général (Richard Roundtree), Brendan décide de la retrouver pour s'assurer qu'elle va bien. Son enquête le mène dans le milieu fermé des bandes, où il croise d'autres personnages, tels la superficielle Laura (Nora Zehetner), le lunatique et violent Tug (Noah Fleiss), le fumeur de joints Dode (Noah Segan), la séductrice Kara (Meagan Good), le sportif Brad (Brian J. White) et « The Pin », le baron de la drogue local (Lukas Haas). Ce dernier va se révéler être un personnage clé dans la quête ultime de Brendan pour découvrir la vérité derrière la disparition d'Emily.

Pour son premier film Rian Johnson réalise un remarquable film noir revu et corrigé en milieu lycéen, cadre plus habituellement réservé à la comédie et au drame. Johnson pense son film comme un véritable hommage au genre, cinématographique comme littéraire notamment avec des citations directes de Dashiell Hammett, des dialogues et situations repris de ses romans tel ce moment issu du Faucon Maltais où le héros demande comme signal à son associée de klaxonner quatre fois — une longue, une courte, une longue, une courte — pour le prévenir. Plus que ces références faciles, c’est la manière dont Rian Johnson intègre les codes du film noir dans le cadre lycéen qui s’avère la plus intéressante.

Les grands films noirs classiques oscillent entre pure approche atmosphérique offrant une sorte de réalité rêvée et onirique chargée d’atmosphère (plutôt ceux des années 40) ou une tonalité plus urbaine et réaliste vers laquelle penchera le genre dans les années 50 pour muter en polar urbain durant la décennie suivante. Pour une intrigue policière teenager tenant compte des contraintes réelles du quotidien de ces protagonistes adolescent, mieux vaut se tourner sur l’excellente et trop courte série Veronica Mars.

Johnson opte donc pour l’option la plus labyrinthique en offrant une vision altérée et irréelle du monde lycéens : adultes et donc parents quasi absent ou faisant de la figuration, aucune scène de cours et personnage ne rentrant quasiment jamais chez eux à l’image du héros incarné par Joseph Gordon Levitt. Un enjeu émotionnel et obsessionnel focalise les enjeux d’un scénario fort tortueux où l’on sait seulement que notre jeune détective cherche à comprendre ce qui est arrivé à sa ex petite amie disparue et qui l’avait contacté terrorisé peur avant de se volatiliser. On va ainsi traverser un univers vicié truffé de personnages manipulateurs et violent où notre Brendan (Joseph Gordon Levitt) devra démêler le vrai du faux et affronter divers danger.

L’ambiance  étrange évoque un autre ovni du teen movie à savoir le Donnie Darko (2001) de Richard Kelly par sa photo pastel, ses décors dont le vide confine à l’abstraction entre banlieue pavillonnaire fantomatique, couloirs de lycée abandonnés et terrain de football désertique. Le Twin Peaks de David Lynch n’est pas loin non avec certaines intuition rêvées de Brendan digne de Dale Cooper. Johnson mêle de manière inventive et/ou décalée des situation typiques de polar, Brendan devant faire la taupe et rendre des comptes au proviseur/commissaire qui le couvre et le menace, la guerre des gangs et les enjeux financiers opposant les malfrats en herbe s’adaptent plutôt bien à cette criminalité précoce.

Joseph Gordon Levitt est le meilleur tout du film en Philip Marlowe adolescent. Il partage la mélancolie romantique du Dana Andrews de Laura avec un aspect plus bagarreur et teigneux à la Bogart surprenant vu sa frêle carrure (sachant répondre aux coups -la scène où il corrige un quater back de football- comme encaisser si besoin) tout en inventant une vraie figure asociale et mutique éloignée de la futilité de ses camarades. C’est cette rage contenue qui lui permettra de sortir des nombreux périls incarné par des ennemis haut en couleurs. Lukas Haas fascine en parrain de la drogue tirant les ficelles, Nora Zehetner vénéneuse femme fatale et Noah Fleiss en homme de main brutal.

Il est dommage que Johnson n’ait pas mieux exploitée Emily De Ravin dont le charme évanescent aurait permis de créer une figure aussi fascinante que (pour rester chez Lynch) Laura Palmer par son destin tragique et renforçant l’intensité de la quête de Brendan car malgré l’intérêt le rythme s’égare parfois un peu, trop en apesanteur même si le final est superbe de tragédie. Belle réussite néanmoins que Rian Johnson confirmera avec un tout aussi alambiqué mais plus romantique Une arnaque presque parfaite (2008).

Sorti en dvd zone 2 français chez Studio Canal

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