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vendredi 23 décembre 2011

El Perdido - The Last Sunset, Robert Aldrich (1961)


O'Malley, coupable de meurtre, est poursuivi par le shérif Dana Stribling. Alors qu'il fuit vers le Mexique, O'Malley décide de rendre visite à Belle Breckenridge, qu'il a aimée, seize ans plus tôt. Quand il la retrouve, il apprend qu'elle est mariée et qu'elle a une fille de seize ans, Missy. John Breckenridge, un ivrogne et un lâche, cherche des hommes pour conduire son troupeau jusqu'au Texas. O'Malley accepte, contre le cinquième de ce troupeau. Quand Stribling le rejoint, O'Malley lui propose de reprendre son ancien métier de cow-boy et de l'aider à conduire les bêtes jusqu'à la ville où il est justement recherché pour meurtre...

The Last Sunset se situe dans une période creuse de la carrière de Robert Aldrich. Après avoir aligné les chefs d'œuvres dans la première moitié des années 50, le réalisateur marquait le pas après l'échec du Grand Couteau. La fermeture de sa société de production Associates and Aldrich (qui renaîtra de ses cendres grâce au succès des Douze Salopards) l'obligeait à accepter des projets impersonnels où il ne s'impliquera guère (Sodome et Gomorrhe officieusement dirigé par Sergio Leone) et lui faisant perdre de son pouvoir de décision sur ses films.

Cela s'avérera particulièrement vrai sur El Perdido où Kirk Douglas acteur et producteur via sa société Bryna (en difficulté à l'époque par la production couteuse de Spartacus) s'oppose dès le départ à son réalisateur qu'il ne juge pas assez impliqué Aldrich convoquant (selon Douglas) sur le tournage des scénaristes avec qui il travaille sur ses futurs projets. Tout cela donnera un résultat bancal mais néanmoins réussi et très significatif avec notamment La Vengeance aux deux visages de Brando sur les mutations en cours du western américain.

On sent bien les entraves posées par Kirk Douglas à Aldrich dont le sens de l'excès et la violence ne surgissent que par intermittences, notamment lors des accès de rage de O'Malley (ce moment où il tente d'étrangler un chien) où une terrible scène révélant la lâcheté de l'époux alcoolique joué par Joseph Cotten. Ici la violence est plus sourde et retenue que véritablement active mais n'en est pas moins intense. Les liens passés tumultueux qui lient les personnages instaurent ainsi une tension de tous les instants.

Rock Hudson pourchasse ainsi le criminel Kirk Douglas meurtrier de son beau-frère et les deux vont devoir s'associer en attendant de passer la frontière mexicaine pour convoyer le troupeau conduit par Joseph Cotten, époux claudiquant de Dorothy Malone amour de jeunesse de Douglas. La tension entre Hudson et Douglas n'atteint pas tout à fait les sommets attendus malgré l'interprétation irréprochable car le personnage d'Hudson semble moins fouillé et mis en valeur mais la rivalité amoureuse qui interviendra à mi film exprime bien ce qui oppose et rapproche les deux héros.

Kirk Douglas avec son allure d'archange noir et ses instincts de tueurs sans remords évoquent immédiatement le Lancaster de Vera Cruz. On découvrira pourtant progressivement un être passionné, romantique et figé dans le passé où Dorothy Malone adolescente fit chavirer son cœur. L'acteur délivre là une de ses prestations les plus sensibles, la dureté masquant toujours une âme écorchée vive (magnifique déclaration nocturne dans le désert).

Hudson est lui une figure solide et rassurante (qui représente plus l'avenir que la nostalgie douloureuse qu'éveille Douglas) pour une touchante Dorothy Malone dans un superbe rôle de femme mûre et marquée par la vie.

Ce nœud d'intrigues confère une tonalité romanesque inhabituelle chez Aldrich, qui vire même au psychanalytique dans une dernière partie audacieuse où flotte un parfum d'inceste. L'action se fait finalement assez rare (hormis un fulgurant affrontement en pleine tempête de sable) et le ton très introspectif et rêvé des dernières scènes envoute totalement : l'arrivée d'une sublime et virginale Carole Linley en robe jaune éveillée à la féminité, le regard chargé de souvenir et de désir de Douglas prêt à commettre l'irréparable...

Une révélation finale renforce encore la teneur mélodramatique de l'histoire et lorsqu’Aldrich daigne enfin céder aux canons du genre lors du duel final, c'est une profonde mélancolie qui en guide l'issue avec un sacrifice déchirant. Malgré les défauts dû à sa gestation houleuse (rythme très inégal) un beau western qui n'a pas à rougir face aux autres tentatives d'Aldrich dans le genre.

Sorti en dvd zone 2 françcais chez Sidonis dans la collection western.

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