Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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mercredi 18 août 2010

Le Million - René Clair (1931)



Michel est un artiste peintre parisien, poursuivi par ses créanciers. Il apprend que son billet de loterie a gagné le gros lot. Malheureusement, sa fiancée a donné à un nécessiteux la veste qui contenait le fameux billet ...

Une exceptionnelle réussite de René Clair qui jette un pont idéal entre l'école du comique muet et la comédie loufoque et non sensique à venir avec les Marx Brothers et quelques autres. L'histoire est prétexte à une course poursuite effrénée où un jeune artiste endetté traque son billet de loterie gagnant qui ne cesse de lui échapper après de malheureux concours de circonstances. René Clair fut un des plus virulents réfractaires au cinéma parlant à son arrivée, pensant à juste titre que le cinéma régresserai au théâtre filmé et perdrait toute son inventivité visuelle en se reposant sur le seul dialogue.

Le Million est son deuxième film parlant après le succès de Sous les toits de Paris (la scène d'ouverture en plan séquence sur les toits semble d'ailleurs faire le lien entre les deux films) et il va s'appliquer à y être constamment inventif dans son utilisation du son. Le rythme survolté offre quantité de gags variés où René Clair fait du splapstick typique du muet (le jeu très expressif des acteurs en garde les traces également), notamment lors de la double course poursuite entre le héros et ses créanciers et d'un malfrat traqué par la police. Poursuivis et poursuivants se confondent, se croisent et s'entrechoquent sur un espace réduit dans la frénésie la plus totale, Buster Keaton ou Chaplin ne sont pas bien loin.

L'usage simple du dialogue est tout aussi irrésistible grâce quelques répliques bien senties (tout le début ou la moitié du quartier invective Michel pour ses dettes) et de quiproquos hilarants tel l'épisode du commissariat où Michel est emprisonné par erreur. Les chansons offrent également un constant contrepoint ironique sur l'action, tel la nouvelle de la fortune de Michel qui se propage où les créanciers soudainement bien plus coopératifs. René Lefèvre séducteur et fougueux fait un excellent héros qui a fort à faire avec une galerie de personnages secondaires haute en couleur aux trousses de son billet gagnant : son propre meilleur ami prêt à le trahir, un mystérieux gang de voleur, une croqueuse de diamants américaines...

René Clair atteint des sommets d'inventivité comique quand tout ce beau monde se retrouve dans l'enceinte d'un opéra pour enfin obtenir l'objet tant convoité. On a entre autre du gag à double niveau dans une même scène voir un même plan quand les cantateurs s'animent sur la scène tandis qu'en arrière plan les protagonistes déguisés en figurants s'entredéchirent pour prendre la précieuse veste.

Le meilleur reste cependant quand Clair marie idéalement comique muet et parlant, annonçant même certaines idées de futures grandes comédies musicales comme le couple (Annabella future mme Tyrone Power dégage un charme irrésistible en danseuse étoile jalouse) qui se réconcilie en réagissant par sa gestuelle aux paroles d'une chanson interprétée sur scène. Et que dire de cette bande son reprenant soudain l'ambiance surchauffée d'un stade lorsqu'un match de rugby s'improvise avec la veste dans les coulisses ? Génial tout simplement. Un petit bijou à l'influence considérable qui contient déjà tout ce qui fera le charme de la grande comédie américaine classique.

Disponible uniquement en dvd zone 1 (le dvd est compatible multi zone cependant) dans une belle édition chez Criterion avec en bonus une interview rare de René Clair où il s'explique sur son utilisation du son.

Extrait de la scène d'ouverture

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